Un nouveau pacte est nécessaire pour faire en sorte que les citoyens, dans toute leur diversité, les autorités nationales, régionales et locales, la société civile et les entreprises travaillent main dans la main avec les institutions et les instances consultatives de l’UE

L’intention vise à devenir le premier continent neutre en carbone d’ici 2050.

La déclaration d’intention est louable. Cependant en examinant les propositions établies dans Le Pacte vert pour l’Europe, par la Commission européenne on reste perplexe sur l’absence de mention d’un changement de paradigme dans l’économie. Il y est question de 50 mesures centrées sur l’aménagement de l’économie pour prendre en compte la menace du changement climatique et leurs déclinaisons selon 7 domaines d’action

1. Une énergie propre et décarbonée.

2. Une industrie durable.

3. Un secteur de la construction et de la rénovation plus propre.

4. Une mobilité durable: La promotion de moyens de transport plus durables (le ferroutage par exemple).

5. Une biodiversité préservée ou rétablie.

6. La garantie d’une chaîne alimentaire–de l’agriculture à la consommation –plus durable avec le projet Farm to Fork (F2F).

7. L’élimination de la pollution

8. Mobiliser l’industrie pour une économie propre et circulaire

Frans Timmermans (photo), vice président de la Commission chargé du Pacte vert l’a présenté aux députés du Parlement en indiquant qu’«il faudra des investissements de 260 à 300 milliards d’euros par an publics et surtout privés pour arriver à la neutralité carbone en 2050» soit pas moins de 25% du budget de l’Union européenne et 1.5% du Produit intérieur brut (PIB) de l’Union.

Il n’est nulle part fait allusion au rôle de l’ESS comme le souligne Pour la Solidarité dans un document émis en février.

Une fois de plus l’apport de l’économie solidaire dans la transition écologique et la justice sociale est passé sous silence car si les citoyen.nes sont inclu.es dans certains chapitres au nombre de ceux et celles qui doivent participer à cet effort « colossal » (sic), il n’est nulle part mentionné qu’une attention spécifique et un soutien seront accordés aux entreprises et associations qui mettent d’ores et déjà en œuvre sur les terrains les vœux pieux déclinés dans ce pacte. Une mention est faite de l’économie circulaire mais rien sur les formes existantes qui remplissent d’ores et déjà le cahier des charges que propose le Pacte vert. Qu’il s’agisse d’énergie propre (Enercoop), d’industrie durable ( les coopératives dont celles qui sauvent l’emploi en récupérant l’outil de travail grâce aux salariés qui s’associent), la construction (l’habitat écologique), la mobilité (l’ESS est en pointe sur la promotion des mobilités douces), la préservation de la biodiversité (lutte contre les Grands projets Inutiles pour sauver des biotopes ), les CSA et les AMAP pour les circuits courts alimentaires, l’élimination des déchets etc. Ce sont ces initiatives que l’UE devrait mieux accompagner en augmentant la part du FSE et du FEDER allouée à l’économie solidaire et pas uniquement à l’économie sociale qui n’est pas la parente pauvre en la matière. C’est la dynamique d’innovation qu’il faut encourager dans tous les domaines qui participent à la transition.

Le Pacte mentionne l’éducation et la formation. La Commission élaborera un cadre de compétences européen pour contribuer au développement et à l’évaluation des connaissances, des compétences et des attitudes en matière de changement climatique et de développement durable.

Le RIPESS et ses membres mène actuellement trois projets de formation pour inviter l’ESS dans la formation initiale ou celle des élus après avoir constaté par le biais d’une enquête au sein des pays participants sa quasi absence dans les programmes de formation. Peut-on espérer de ce nouveau Pacte un accueil favorable de ces travaux dont nous ferons valoir des recommandations

Il convient de mettre un terme aux subventions accordées aux combustibles fossiles. Cette assertion est pertinente. Sa mise en œuvre est d’ailleurs un préalable à toute politique de lutte contre les dégâts engendrés par leur utilisation. On voit mal cependant comment la Commission va réussir à l’imposer même s’il est annoncé que des financements sont prévus pour accompagner les pays dépendants du charbon par exemple. En revanche, l’alliance des citoyen.nes peut précipiter ce mouvement comme l’a fait celle des consommateur.trices pour l’agriculture bio.

C’est le rôle d’un réseau de relayer du terrain vers les institutions et vice versa les données essentielles à l’orientation d’une politique qui a du sens pour l’évolution de la société.

Le pacte pour le climat s’appuiera sur les séries de dialogues avec les citoyen.nes et les assemblées des citoyen.nes qui sont en cours dans l’ensemble de l’UE, ainsi que sur les comités de dialogue social.

Le règlement Aarhus devrait être révisé afin d’améliorer l’accès au contrôle administratif et juridictionnel au niveau de l’UE pour les citoyen.nes et les ONG qui ont des doutes sur la légalité des décisions ayant des incidences sur l’environnement.

On peut utiliser les plateformes disponibles pour simplifier la législation et recenser les cas problématiques.

Tout en soulignant l’absence de mention de l’ESS, on ne peut à l’avance mettre en doute la volonté de faire évoluer la politique européenne vers une économie décarbonnée mais on se doit d’être vigilants afin que la manne dévolue ne tombe dans l’escarcelle de grands groupes qui prétendront « verdir » leurs méthodes quand ils utiliseront ces financements pour renforcer leur suprématie au détriment des initiatives réellement soucieuses de préserver la planète et la justice sociale. Il est temps que l’Europe encourage la démultiplication d’un développement adapté aux réalités locales, porté par des assemblées démocratiques où élu.es et citoyen.nes se consultent et s’accordent. L’économie solidaire peut témoigner de la pertinence de ces démarches qui réussissent en dépit des contraintes budgétaires et pourraient donner de plus amples résultats si ces freins étaient levés.

Josette Combes