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Si des monnaies locales complémentaires circulaient déjà dans les années 1930 en Europe puis dans les années 1980/90 dans les Amériques, il est indéniable qu’elles connaissent actuellement un fort regain d’intérêt dans le monde entier, tant en ce qui concerne l’effervescence du soutien populaire que le potentiel de leur développement technologique et économique.

La monnaie Léman est née en 2015 dans le bassin lémanique (autour de Genève) et présente un lot de particularités. Il s’agit d’une monnaie transfrontalière, qui se base sur le bassin de vie plutôt que sur des frontières administratives ; elle a pour ambition d’allier une monnaie papier nantie (80’000 lémans sont aujourd’hui en circulation auprès de 300 professionnels) et une monnaie numérique au sein d’un système de crédit mutuel (actuellement en construction, afin de mettre à disposition des membres un crédit à taux 0 et reposant sur des dettes multilatérales).

Le Léman, en collaboration avec le Forum Démocratique Mondial (fDM), travaille au développement de la dimension translocale des monnaies locales. Ce changement scalaire est crucial, car il permet de donner une identité commune à des mouvements locaux, et prévient les projets de toute tentation autarcique. Les rencontres internationales telles que l’International Civil Society Week de CIVICUS (mai 2016 à Bogota) ou le Forum Social Mondial (août 2016 à Montréal) ont permis aux équipes du Léman et du fDM de rencontrer des réseaux nationaux tels que le Réseau SOL français, Transition Town en Angleterre ou le Sardex en Italie, et d’aider à la construction de réseaux nationaux comme cela a pu être le cas en Colombie et au Canada.

En appuyant cette dynamique internationale, l’équipe du Forum Démocratique Mondial travaille, sous la direction de Jean Rossiaud, à une plateforme wikipedia. L’objectif est de mettre en discussion cette plateforme à l’occasion de la Conférence internationale sur les monnaies sociales et complémentaires qui se tiendra à Barcelone du 10 au 14 mai 2017. Un tel outil est en effet indispensable, notamment pour coordonner au mieux les développements technologiques en opensource, échanger et conseiller sur les différents systèmes juridiques et administratifs nationaux, et faire profiter les nouveaux projets de l’expérience (gouvernance, étapes, etc.) et du matériel déjà opérationnel.

Que le développement des monnaies locales complémentaires se fasse à l’échelle d’un quartier, d’un bassin de vie, d’un continent ou du monde, il doit se faire en étroite collaboration avec les réseaux et les Chambres de l’Economie Sociale et Solidaire (ESS). La Conférence « Monnaies locales d’ici et d’ailleurs : La monnaie comme ciment de l’économie locale de demain », donnée vendredi 23 septembre à Genève, en présence des président(e)s de chambres suisses de l’ESS, Carole Zgraggen (APRES-Genève) et Dominique Roten (APRES – Vaud), et du Délégué général du RIPESS EU, Jason Nardi, a appuyé la nécessité et la pertinence d’une articulation commune. Les réseaux de l’ESS constituent le terreau économique naturel pour le lancement d’une monnaie locale, car ils témoignent d’une vision et de pratiques sociales et environnementales que doit développer la monnaie locale ; de son côté, une monnaie locale est un outil puissant pour le développement des interactions économiques intra-ESS d’une part, mais également au-delà de ce réseau somme toute modeste, en sensibilisant des acteurs locaux à ses valeurs et en les intégrant progressivement à cette dynamique. Ainsi, Economie Sociale et Solidaire et Monnaie Locale sont vouées à se renforcer mutuellement pour permettre la consolidation et le développement de l’économie de demain, en marginalisant peu à peu de celle d’hier.

Antonin Calderon

Secrétaire général de Monnaie Léman